Merci !

Publié le par cherki

tunisie 

Merci, merci au peuple tunisien, grâce à lui l’année 2011 commence par une bonne nouvelle. Ben Ali a été chassé du pouvoir par la mobilisation conjuguée de la jeunesse tunisienne, de sa classe moyenne et de l’ensemble du salariat tunisien grâce au rôle important et souterrain joué depuis de nombreuses années et ces dernières semaines par sa principale centrale syndicale, l’UGTT. L’année commence par une Révolution qui chasse un népote corrompu et ayant dirigé d’une main de fer ce pays avec la complaisance, voire les encouragements des pays occidentaux et des régimes autoritaires du Maghreb, du proche et moyen-orient. Nicolas Sarkozy et son gouvernement, par leur incapacité à comprendre le processus en cours, par leur soutien pathétique à un pouvoir discrédité et déconfit, ont donné une image déplorable de notre pays dans cette partie du monde où souffle une légitime volonté de changement démocratique. Dans cette partie du globe aussi les peuples aspirent à la démocratie et il est heureux de constater que contrairement aux prédictions complaisantes et erronées de nos « élites » il existe un autre choix que celui mortifère entre népotisme pro-occidental et islamisme. C’est peut-être aussi pour cela que nos dirigeants ont peur des changements en cours en Tunisie qui sont lourds de promesses pour les peuples et de menaces pour les régimes. Bien sûr la révolution en cours en Tunisie n’est pas forcément reproductible à l’identique dans l’ensemble de la région. La Tunisie possède une classe ouvrière structurée autour d’une centrale syndicale puissante l’UGTT qui est devenue au fil des années un des rares espaces d’organisation et de médiation collective. Elle possède aussi une classe moyenne et une jeunesse éduquée et laïcisée, ouverte aux valeurs universelles. Les femmes, au moins dans les villes, ont conquis une place qui les rapproche des standards par trop imparfaits de l’Europe méditérannéenne. Enfin, et pour son plus grand bonheur peut-être, la Tunisie ne possède pas d’importantes réserves d’hydrocarbures ou de minerais qui favorisent une organisation parasitaire d’une économie de rente et doit don constamment se poser la question de la qualification de sa main d’œuvre. Dans les années 80 et surtout 90, avec le concours de l’Union Européenne, elle était devenue la base manufacturière de l’industrie textile européenne lui permettant d’accéder au rang de premier exportateur industriel d’Afrique en valeur absolue en 1999. Depuis, la tyrannie du libre-échange est passée par là et la Tunisie a subi de plein fouet la concurrence de la Chine et des pays d’Asie du sud-est qui ont bénéficié de l’ouverture à tout vent du marché européen. En 2005 l’industrie textile tunisienne est entrée en crise alors qu’elle représentait 40% des exportations, 46% des emplois industriels et 80% de la main d’œuvre féminine du pays. L’industrie du tourisme n’a pu et ne pourra pas prendre le relais à elle seule. La même question se pose aussi en germe à l’économie marocaine. C’est pourquoi il existe un lien entre tyrannie du libre-échange et crise structurelle de l’économie tunisienne. Les pays européens, à commencer par la France  qui est le 1er partenaire économique de la Tunisie et qui n’a comme mot d’ordre que la stabilité de ce pays et de la zone, seraient bien inspirés de revisiter leur soumission au libre-échange mondial et de reconstruire un partenariat privilégié avec les pays du Maghreb. C’est la meilleur aide à la consolidation de la renaissance démocratique de la Tunisie qu’ils pourraient apporter. En attendant, aujourd’hui, je me sens un peu plus tunisien.

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